OpenStreetMap et MaS

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Usage d'OSM chez les acteurs de la MaS.png

Description en une ligne : Étude sur les usages d'OpenStreetMap par les acteurs de la Mobilité par Association de Services (MaS)

Description :

Introduction

Ces dernières années ont marqué l’émergence du concept de mobilité par association de services (MAS), visant à fluidifier les interactions utilisateurs avec leur mobilité multimodale. Cette popularisation est attribuable aux efforts législatifs autour de la loi d’orientation des mobilités (LOM), mais aussi par des initiatives de communs numériques et leurs ressources en open source ou open data.

Depuis sa création, la Fabrique des Mobilités s’intéresse aux infrastructures numériques au service de la mobilité décarbonée. Elle a participé à cet élan autour de la MAS avec la constitution d’une communauté d’experts sollicitée dans le cadre de publications, d’hackathon, d’ateliers, et de création ou support de communs (standards, outils etc..).

Plusieurs constats émanent de cette communauté, l’un d’entre eux concerne l’importance de la qualité et l’exhaustivité des données comme socle pour ces infrastructures numériques. Une exhaustivité difficilement atteignable sans un effort distribué et mutualisé. Un exemple concret revient alors fréquemment : OpenStreetMap (OSM), le projet de carte ouverte et collaborative, souvent appelée le Wikipédia de la cartographie.

Grace au soutien de l’ADEME, l’association présente aujourd’hui cette étude comme une initiative de fédération des communautés contributives d’OpenStreetMap et institutionnelles de la mobilité servicielle. Pour ce faire, y est décrit:

  • les problématiques et l’usage des données dans la MAS, récoltés au cours d’entretiens d’experts.
  • des exemples d’usage concrets d’OSM par les acteurs des services de mobilité
  • des détails techniques sur les champs OSM considérés pour répondre à ces problématiques et cas d’usages
  • les différences de philosophie entre les fonctionnements institutionnels et la contribution par la multitude
  • des propositions de pistes de travail et contributions


L’étude s’adresse à la fois

  • aux collectivités territoriales en recherche d’alternatives ouvertes et contributives pour encourager la mobilité sur leurs territoires
  • aux concepteurs de services de mobilité et MAS considérant OpenStreetMap comme une source de donnée potentielle
  • aux contributeurs individuels d’OpenStreetMap souhaitant accentuer leurs travaux sur les problématiques de la mobilité.


Un atelier de resitution auprès de la communauté OpenStreetMap a été réalisé en 2024. Consultez le compte rendu: OpenStreetMap et MaS : CR Atelier State of the Map France 2024

Définition: La mobilité par association de services

La Mobilité par Association de Services (MaS) ou Mobility as a Service (MaaS) consiste en l’utilisation d’une interface numérique unifiée offrant à un utilisateur des services répondant de manière intégrée et personnalisée à ses besoins de mobilité. Ces services sont la promesse d’une expérience utilisateur fluidifiée pour l’information, la vente et la réservation de billets, et donc d’une mobilité multimodale facilitée pour tous, diminuant ainsi l’usage contraint de la voiture individuelle.

Un service MaS permet d’agir, via une interface numérique unique, à la fois :

  • sur l’information voyageur, afin de participer à la rationalisation des choix de mobilité (personnalisation de l’itinéraire de mobilité en réponse à un besoin spécifique, approche servicielle permettant en plus du calcul d’itinéraire la réservation, le paiement, la billettique…)
  • sur la promotion des alternatives à la voiture individuelle, en prenant en compte l’ensemble des modes de transport alternatifs dans le calcul d’itinéraire, avec leur état en temps réel ;
  • sur l’incitation à changer de mode, en appliquant par exemple une tarification privilégiant une chaîne de déplacement plus optimale pour la collectivité via une subvention publique additionnelle.


C’est un sujet d’intérêt en France depuis une dizaine d’années (activités de l’AFIMB à partir de 2010, rapport Jutand en 2015, Assises de la Mobilité en 2017), et, d’une manière, accéléré avec la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM, 2019), l’ouverture de la plateforme transport.data.gouv.fr (Point d’Accès National ou PAN) et les efforts de standardisation de données et d’interfaces.

Composants de la Mas.png


(Définition extraite de FranceMobilites et de l’état des lieux des MAS en France proposé par la Fabrique des Mobilités)

Définition: OpenStreetMap

OpenStreetMap (OSM) est un projet ayant pour but de constituer une base libre de données géographiques du monde. Il a été initié en juillet 2004 par Steve Coast au University College de Londres. C’est aujourd’hui la plus grande base libre de données géographiques au monde, grâce aux contributions quotidiennes de plus d’un million d’utilisateurs.

Son utilisation la plus courante est la création de cartes sous licence libre, mais ses données sont aussi utilisables de manière plus brute, par exemple pour l’extraction de référentiels spécifiques comme les localisations d’aménagements cyclables ou d’infrastructures routières et ferroviaires.

Pour les consommateurs de ces données, OSM agit comme une alternative aux sources propriétaires, souvent onéreuses, et parfois lacunaire ou caduc.

Une présentation plus complète du projet est disponible sur le wiki de La Fabrique des Mobilités.

Le Cyclisme en France d’après OpenStreetMap. Cliquez pour agrandir.

OSM ne couvre pas toute la MaS

Avec cette définition, il est important de comprendre qu’OpenStreetMap n’est donc pas un service de mobilité, mais un support pour ces services.

En particulier, c’est un support pour le premier service cœur de la MaS, l’information voyageur. Les autres éléments cœur, la réservation, l’achat, le paiement et les transactions ne bénéficient pas des données offertes par le commun. Des sources et des outils complémentaires restent alors nécessaire pour couvrir l’ensemble de ce périmètre.

L’information voyageur (IV) reste une étape essentielle de la MaS, indispensable pour faire découvrir aux utilisateurs l’offre de mobilité disponible. Sans une bonne communication sur la disponibilité, le chemin et les horaires, un investissement dans l’ouverture d’une nouvelle ligne de bus ne pourra séduire aucun voyageur.

Néanmoins, l’unique information voyageur n’est pas la promesse initiale de la MaS. Sa valeur réside, par définition, dans l’association de services de mobilité et l’interconnexion de ces derniers, en particulier sur les aspects de billettique. Cette association fait la complexité de la thématique, une complexité telle qu’elle remet parfois en question la valeur même du concept initial.

Avec ou sans MaS, l’information voyageur reste un sujet à part entière avec une dimension digitale qui bénéficie grandement d’initiatives ouvertes comme OSM. Un sujet qui continuera d’exister même si le concept de la MaS n’est plus jugé utile, par exemple en cas de gratuité des transports ou de déploiement d’un titre de transport universel.

Cette étude adresse donc les services de mobilité (bus, train, vélo) qui bénéficient d’une base cartographique comme infrastructure numérique. Des données géographiques qui seront par la suite complétées d’autres sources telles que des standards de définition des services de mobilité (GTFS, NETEX, GBFS etc..) et des outils comme les systèmes de découverte de tarification ou les services de réservation et paiement.

Exemple d’information voyageur (IV), avec le calculateur d’itinéraire de Grenoble, basé sur OpenStreetMap

Acteurs de la mobilité et OSM

À travers des entretiens d’experts, trois types de profils d’utilisateur d’OSM ont émergés autour de la mobilité: les collectivités territoriales, les concepteurs de services numériques et les contributeurs individuels.

Collectivités territoriales

Pour les collectivités, et l’état dans une moindre mesure, l’utilisation ou non d’OSM passe avant tout par son interaction avec les outils de gestion et planification de mobilités utilisés en interne. Le choix d’utiliser OSM est donc indirect, et parfois inconscient, résultant parfois dans les problématiques de contribution exposées en fin d’étude.

Même si elle est présente chez les utilisateurs questionnés, la dimension éthique et communautaire d’un projet ouvert comme OSM n’est pas un argument critique dans le choix de la source. La praticité et simplicité d’utilisation des outils est en effet privilégiée.

Le choix de ces outils est souvent le résultat d’un historique qui prédate la popularisation d’OSM et même les problématiques de décarbonation de la mobilité. En effet, pour répondre à des besoins de planification, de gestion ou d’entretien de l’espace public, les collectivités disposent historiquement d’un certain nombre d’outils et de référentiels cartographiques de leurs territoires. Ces bases de données sont alors transmises, tant bien que mal, aux services de mobilité qui continuent d’utiliser les mêmes outils pour les exploiter. ArcGis est un exemple fréquent d’outil se basant sur des référentiels incompatibles avec les initiatives ouvertes, comme OSM.

De l’autre côté du spectre, la puissance publique s’impose de plus en plus de règles vis-à-vis de ses usages du numérique. Elle privilégiera par exemple les solution qu’elle peut héberger elle-même, les acteurs et sources françaises ou européennes et les offres standardisées. Et ce, pour des questions de résiliences et d’indépendance vis-à-vis d’acteurs uniques. Ces conditions orientent naturellement les nouveaux choix technologiques vers des solutions libres, open source ou open data.

Ce dernier point s’illustre avec une brique essentielle de l’information voyageur, les calculateurs d’itinéraires. Afin de répondre à ces nouvelles règles, des technologies de calcul d’itinéraires open source sont de plus en plus privilégiées, à l’instar d’OpenTripPlanner, MOTIS, Open Route Service, Graphhopper, Valhalla, OSRM ou encore pgRouting. Les choix sont nombreux en fonction des cas d’usage précis, mais ils ont tous l’usage d’OpenStreetMap comme source de donnée en commun.

L’utilisation de ces outils ouverts représente tout de même un investissement important pour une collectivité, qui dispose rarement de compétences internalisées pour gérer ces sujets. Ce constat s’applique aussi à OpenStreetMap, qui ajoute aussi une dimension contributive supplémentaire. Cette charge de travail est un élément critique majeur dans les décisions et choix techniques des collectivités. Faute de ressources, elles délèguent et confient donc cette expertise à des concepteurs de services et solutions, qui décident pour elles.

Concepteurs de services numériques

Dans la mobilité française, les principaux concepteurs d’application ne sont pas nombreux, en particulier sur la niche de la MaS. En effet, la plupart des territoires disposent d’une application de mobilité à destination de ces citoyens, mais ces dernières sont conçues en marque blanche par une petite dizaine d’acteurs.

Les applications MaS les plus populaires sont Île-de-France Mobilités, Bonjour Ratp à Paris, SNCF Connect, Modalis en Nouvel-Aquitaine, TBM à Bordeaux, l’appli M à Grenoble ou encore l’appli STAR à Rennes.

Dans son état des lieux des MAS en France la Fabrique des Mobilités propose une liste des acteurs de la MaS. Le tableau ci-dessous affiche pour chaque acteur s’il source une partie de ses données sur OSM. Ce tableau n’est pas une science exacte, ce type d’information étant difficilement accessible, en particulier pour les concepteurs ayant de nombreux projets, tous différents. Les acteurs utilisateurs d’OSM sont d’ailleurs invités à se manifester, en public et auprès de la Fabrique des Mobilités pour mettre à jour cette liste.

Type d’acteur Acteur Utilise OSM? Source
Éditeur/opérateur mas Instant System Utilisent Navitia, donc OSM pour IDFM (1). Utilisent aussi OSM pour Fluo.eu (2) 1 2
Éditeur/opérateur mas Cityway Généralement fonctionne sans OSM, sauf un fond de carte OSM sur Moovizy (mais vraisemblablement Here est utilisé comme calculateur d’itinéraire) et un potentiel usage sur KorriGo (ex MobiBreizh). Indirectement, Cityway bénéficie peut-être d’OSM au vu des partenariat entre la maison mère Transdev et Geovelo. 1 2
Éditeur/opérateur mas Monkey Factory Les mentions légales citent OSM comme outil de cartographie, pas comme source de données (POI). Indirectement, MF bénéficie d’OSM dans des partenariats avec Geovelo. 1
Éditeur/opérateur mas Ratp smart systems Oui, comme source pour les rues en R&D (1), Mappy en fond de carte aussi, mais pas en POI. Pistes cyclables issues d’OSM aussi sur Mappy (2) et GPS vélo basé sur Valhalla (donc OSM) (3) 1 2 3
Éditeur/opérateur mas ViaTransit OSM en service de cartographie et OpenRouteService en calculateur d’itinéraire 1
Éditeur/opérateur mas Moovit Des contributions à OSM existent au nom de Moovit (1), OSM est aussi utilisé en fond de carte et POI sur la version en ligne. Dans l’ensemble, les données sont propriétaires. En particulier via les “mooviters”, une communauté d’utilisateurs qui cartographie pour Moovit, sans lien avec OSM. 1
Éditeur mas privé Citymapper Oui, et contribue 1
Éditeur mas privé SncfConnect Aucun usage apparent
Éditeur mas privé Uber Oui, au global, mais en France la data vient plutôt de Michelin et du cadastre 1
Éditeur mas privé Blablacar Aucun usage apparent
Autres fournisseurs mas Betterway Aucun usage apparent
Autres fournisseurs mas Skipr Aucun usage apparent
Autres fournisseurs mas Flowbird Aucun usage apparent, y compris dans le cas de la MaS Monapass
Fournisseurs techno mas b2b Hove Le calculateur d’itinéraire Navitia utilise OSM 1 2
Fournisseurs techno mas b2b Trillium Transit Aucun usage apparent
Fournisseurs techno mas b2b enRoute En fond de carte pour son appli Chouette
Fournisseurs techno mas b2b Fluctuo En fond de carte uniquement ?
Fournisseurs techno mas b2b Lyko Aucun usage apparent

Connexes aux MaS, d’autres acteurs de la mobilité ont présenté leur usage d’OSM lors de la conférence State of the Map France


Ce dernier est un exemple de l’excellent travail réalisé par les entreprises et individus membres de la fédération des pros d’OSM dont certains (JungleBus, Geovelo …) dédient leurs activités à la place de la mobilité dans OSM, et inversement.

Ces acteurs qui ont fait le choix de centraliser leur modèle économique ou leur activité sur OSM demeurent tout de même minoritaires dans le domaine. Pour les autres, le choix d’utiliser ou non le commun se justifie d’une manière similaire aux collectivités territoriales. La décision est avant tout motivée par le choix d’outils et services qui en dépendent.

OpenStreetMap est alors considéré comme une source de données comme une autre, sans possibilité d’amélioration, faute de ressource internes et de stratégie d’entreprise. La possibilité et valeur de la contribution communautaire par l’entreprise est alors ignorée. Un constat déploré par les techniciens utilisateurs d’OSM dans ces structures.

Le projet et son client influencent aussi la décision. Un territoire souhaitant par exemple mettre en avant une mobilité autour de point d’intérêts touristiques incitera probablement un concepteur d’applications à utiliser une alternative plus performante que Nominatim, le “géocodeur” utilisant OSM pour traduire entre nom, adresse et coordonnées GPS. De même, un cas d’usage centralisé autour de l’offre de transport en commun incitera le concepteur à s’aider d’un service spécialisé comme Navitia. La qualité de la donnée est alors comparée aux autres offres du marché, en bien ou en mal en fonction des situations. D’autres cas d’usages, en fonction du type de transport ou du besoin d’exhaustivité, sont présentés ci-après (Cas d’usage et données).

Enfin, l’aspect économique de faire appel à une solution propriétaire par rapport à l’apparente gratuité d’OSM ne semble pas être un critère décisif pour ces acteurs. En effet, avec les nécessités de validation de la donnée et la complexité d’intégration, OSM démontre que, comme souvent avec les logiciels libres, les couts sont en réalité comparables aux offres propriétaires lorsque les compétences manquent en interne.

À nouveau, le choix dépasse la question de la source de donnée, et s’applique à une stratégie d’entreprise, entre concentration sur une valeur cœur de la société et dépendance aux acteurs externes ou internalisation des compétences et contrôle sur l’ensemble de la chaine de valeur.

Usage d'OSM chez les acteurs de la MaS.png

Contributeurs individuels

Même si la contribution individuelle n’est pas couverte dans la première version de cette étude, elle mérite d’être mentionnée, car c’est elle qui fait la force d’un commun communautaire comme OpenStreetMap.

C’est en effet grâce aux efforts de ces contributeurs volontaires qu’OpenStreetMap affiche une importante qualité et exhaustivité de données libres d’accès.

Ces contributeurs sont aussi les détenteurs du savoir dans l’utilisation d’OSM, en particulier sur les questions sémantiques ou l’interaction avec ces derniers est inévitable (via le wiki, forum, ou événements).

Dans ce contexte, La Fabrique des Mobilités prévoit de prochainement sonder ces contributeurs experts sur leur vision de la mobilité dans OSM, par exemple lors du prochain événement de la communauté francophone (SOTMFR). Soit directement, soit avec le soutien d’une autre fabrique, par exemple la Fabrique des Géocommuns de l’IGN.

Cas d’usage et données OSM

De la même manière qu’il est complexe d’afficher tous les modes de transport sur une même carte, le traitement de données de mobilité est généralement divisé par mode de transport. Cette division est d’autant plus pertinente pour les acteurs comme Geovelo qui focalisent leurs activités sur une verticale précise.

Néanmoins, l’univers de la MaS reste par définition multimodale, ce qui impose un travail de mise en relation des différents référentiels. Un travail simplifié lorsque la source est commune, comme dans le cas d’OpenStreetMap, même si les “relations” ne sont pas toujours exhaustives.

Dans la sémantique OSM, une relation est un regroupement d’objets, par exemple une zone de transport en commun peut regrouper des arrêts de bus et train. La relation définie alors la possibilité d’un transfert de passagers d’un mode à l’autre. C’est une information indispensable au calcul d’itinéraire multimodal, et souvent à reconstruire lorsque les sources sont disctinctes. Un travail complexe, car la proximité géographique n’est pas toujours suffisante, par exemple dans le cas de stations d’un côté et d’autre d’une rivière, sans pont pour traverser.

Une base de donnée couvrant l’ensemble des modes de transport comme OSM facilite donc ces liens, mais les acteurs de la mobilité ne l’utilisent rarement seule, y compris dans le périmètre restreint de l’information voyageur.

En effet, un caractère important des données OSM est leur dimension statique et non dynamique. Le référentiel contient des informations peu susceptibles de changer dans le temps, comme les infrastructures routières. Il ne contient pas d’informations temps réel, comme une occupation temporaire des voies, des informations d’affluences ou des délais dans le passage de transport en commun.

Pour ce type de données, les acteurs s’équipent autrement. Soit en interne avec les données d’usages de leurs utilisateurs (Geovelo par exemple). Soit auprès d’autres sources, comme le GTFS-RT publié par certains opérateurs de transports ou via des applicatifs de déclaration d’incident (Waze ou sources publiques comme les arrêtés des préfectures ou les applis type DansMaRue/Vigilo).

Côté OSM, le mot d’ordre est clair, “les modifications de voirie de moins de 1 mois, ce n’est pas la peine de les mettre”, même si des projets d’ajout de dynamisme ont été envisagés en périphérie, comme l’Open Event Database, sans grand succès.

Pour autant, le référentiel statique reste très à jour, les acteurs de la mobilité apprécient la réactivité entre une contribution communautaire, par exemple sur le changement de sens d’une rue, et sa disponibilité sur les exports, en général en 24h. Une vélocité rare, si elle existe, dans les alternatives propriétaires.

Ce chapitre présente plus en détail des exemples de données disponibles dans OSM pour différents modes de transports décarbonés, mais il existe des domaines ou OpenStreetMap s’illustre dans la qualité et l’exhaustivité des données contribuées:

Marche et accessibilité

Dans la MaS, la marche est généralement considérée comme une pratique faisant le lien entre des modes de transport plus lourd que comme un mode à part entière.

Avec ce constat, le piéton est apparenté à un véhicule circulant le long d’une voie routière, et de fait, bénéficie de l’exhaustivité des infrastructures routières d’OSM. Pour les concepteurs d’application, cette précision est jugée suffisante et les données OSM satisfaisantes sur cette thématique.

Cette satisfaction provient du fait que dans un déplacement typique incluant des transports en commun, la marche représente rarement une part significative du temps de trajet. De fait, une erreur de quelques minutes lié à un routage piéton non optimisé n’influe pas grandement le résultat final. Une décision qui ignore donc les bonnes pratiques de cartographie pour le routage piéton proposée par la communauté OSM et les efforts de cartographie d’intérieur, notamment des gares avec SNCF Transilien et Carto’Cité.

Néanmoins, ce constat n’est plus applicable lorsque la MaS est du ressort d’une collectivité territoriale ou de l’état. Ces derniers ont en effet la responsabilité étendue de ne pas servir la majorité des utilisateurs, mais son ensemble, y compris les personnes nécessitant un guidage plus précis.

Sur cette thématique d’accessibilité, les experts indiquent que la structure d’OSM est correcte, car le système de tags est malléable, mais pas complètement pensée pour la navigation des personnes à mobilité réduite (PMR), rendant les travaux de référencement et les réutilisations difficiles.

Dans l’ensemble, le manque de données n’est pas lié à un manque de sources, que ce soit via l’open data gouvernementale, les images satellites ou encore les photographies terrain via Mapillary ou bientôt Panoramax. Il n’est pas non plus lié à une complexité inhérente à la structure de données, mais bien à un manque de ressource humaine. Les tâches étant fastidieuses, la contribution bénévole est rare.

L’excellent rapport du projet Open Marchabilité, porté par Someware et Florent Morel, revient plus en détails sur la place des données de marche et d’accessibilité dans OSM, et les actions pour les améliorer.

De son côté, la Fabrique des Mobilités explore aussi plus généralement cette pratique et son interactions avec l’espace public. Par exemple au sein de sa communauté Communauté Marche ou via son Exploration "Trottoirs & Numérique".

Vélo

En dehors des géants américains (97% des usages tout de même), tous les calculateurs d’itinéraires vélo utilisent d’une manière ou une autre OpenStreetMap. En France, un acteur incontournable de cet usage est Geovelo, qui a su se placer comme moteur de référence sur ce mode de transport. Une position leur permettant de nouer des partenariats avec les concepteurs de solutions MaS (Transdev, Ratp dev, Instant systems, Monkey Factory etc..), qui font appels aux API Geovelo pour ces itinéraires cyclables, et deviennent, de fait, utilisateurs indirects, et parfois involontaires, d’OpenStreetMap.

L’entreprise partage régulièrement ses retours et outils autour de la place du vélo dans OSM et permet, à travers leur regard, de comprendre les besoins et interactions des acteurs de la mobilité cyclable. Elle partageait par exemple en 2021 le processus d’évaluation de la qualité des données cyclables d’une région sous la forme d’une quarantaine d’attributs pour mesurer qualité interne (précision géométrique, exhaustivité, précision sémantique, cohérence logique, actualité, homogénéité, fiabilité) et externe (adéquation aux besoins et utilisations). Des indicateurs aussi présents dans un outil de visualisation des aménagements cyclables.

Pour Geovelo, OpenSteetMap représente 90% des sources externes utilisées pour le calcul cyclable, complété uniquement par des bases d’altitude, généralement en provenance de l’IGN. Un usage aussi partagé par des acteurs, parfois concurrents, qui ne contribuent pas au commun, comme IDFM, Komoot, Strava, associations cyclistes, observatoires etc…

Cette exhaustivité est aussi due à une organisation de la communauté des contributeurs. Par exemple autour de recommandations sur comment entrer et baliser les données liées au cyclisme et aux aménagements cyclables dans OSM.

Enfin, là où le format OSM peut difficilement servir de base pour les standards d’accessibilité, il a été jugé pertinent pour la standardisation des données d’aménagements cyclables, probablement de-facto par son usage. Cette proximité permet un export régulier de données sur l’ensemble du territoire français, d’OpenStreetMap vers le Point d’Accès National aux données de transport.

Transport en commun

Le rôle principal d’une carte focalisée sur la route est généralement d’aider les gens à se diriger et à se repérer dans les rues, que ce soit à pied ou dans un véhicule motorisé.

Contrairement à la marche ou à la conduite, où la cartographie des rues et du cheminement piéton est suffisante pour permettre à chacun de décider de son propre itinéraire, les transports en communs imposent de décrire l’infrastructure (par exemple le chemin de fer) mais aussi les services qui en dépendent (par exemple, les trains express et trains locaux ou trains de banlieue).

Pour les acteurs de la mobilité, la description de l’infrastructure est la donnée majoritairement consommée depuis OSM. La France disposant d’une initiative unique de distribution d’information sur l’offre de transport via le Point D’accès National (GTFS/Netex), cette source est privilégiée pour les informations sur les services (horaires et lignes).

Dans la communauté OSM, un standard sémantique existe depuis quelques années pour le référencement des transports collectifs. Assurant une méthode claire pour identifier, par exemple, les arrêts de transports ou les voies de bus.

Mais cette méthode de travail ne garantie pas l’exhaustivité des résultats. Une complétude présentée lors d’un audit sur l’Ile-de-france en 2019 par JungleBus, un acteur incontournable de la mobilité collective dans OpenStreetMap. L’étude y compare les données ouvertes au format GTFS et les données présentes dans OSM. Voici un extrait des conclusions:

À ce jour, OpenStreetMap ne contient pas l’intégralité des données transport disponibles sur la région : la contribution est géographiquement hétérogène et dès qu’on s’éloigne des tracés du réseau ferré d’Île-de-France dans les départements de la grande couronne, les données crowdsourcées sont incomplètes. On note une corrélation claire entre la densité de population et le taux de complétion des données dans OpenStreetMap.

De plus, il existe de réelles différences de modélisation qui peuvent venir complexifier l’enrichissement d’une source à partir de l’autre : un arrêt, une ligne ou même un tracé de ligne ne représentent pas toujours le même objet dans nos deux sources. En s’appuyant sur des critères restrictifs, nous avons construit un échantillon comparable dans les deux sources afin de mitiger ce problème.

Par ailleurs, en un an d’étude, le volume de notre échantillon comparable a été multiplié par plus de 4 ! Ainsi, si la base OpenStreetMap n’est pas exhaustive, la contribution y est donc extrêmement active : il y a donc un réel intérêt à s’appuyer sur la communauté pour améliorer les données de transports.

Véhicules électriques

Les véhicules électriques bénéficient de la qualité du réseau routier ou cyclable en fonction de leur gabarit. Ils ne sont pas traités différemment des autres modes de transports dans les calculateurs d’itinéraires. Mais cela pourrait devenir un sujet dans le futur avec l’émergence des véhicules intermédiaires (VELI).

Ces données automobiles classiques sont ensuite complétées des informations sur les infrastructures de recharges. Deux sources ouvertes existent pour les concepteurs d’applications, le fichier consolidé des bornes de recharge pour véhicules électriques (IRVE) sur le Point d’Accès National ou le référencement contributif d’OpenStreetMap.

En pratique, les deux sources sont généralement utilisées simultanément pour assurer la complétude de l’information. Le fichier consolidé est considéré comme plus complet, et la base OSM plus rapidement mise à jour.

Avec le temps, les différences entre les deux référentiels s’amoindrissent, les données du PAN étant utilisées par la communauté OSM pour compléter la cartographie, comme précisé dans cet article de JungleBus en 2020 suite à un “projet du mois” de référencement collaboratif sur cette thématique.

Covoiturage

Le constat est très similaire pour le covoiturage, car la pratique utilise les mêmes données d’infrastructure et bénéficie aussi d’une base publique sur les aires de covoiturage (BNLC). À nouveau, l’outil Osmose permet la comparaison entre cette base nationale et les données présentes dans OSM, pour resserrer l’écart.

Logistique

Ni mode de transport, ni service de mobilité, la thématique de la logistique mérite tout de même une mention par son absence au sein du référentiel cartographique. Pourtant, un nombre significatif des outils présentés jusqu’ici, comme les calculateurs d’itinéraires et certains services MaS, sont aussi utilisés pour le déplacement de marchandises.

La Fabrique de la Logistique initie par exemple un travail sur la digitalisation d’un référentiel des adresses logistiques. Un projet qui fait écho aux efforts autour de la Base d’Adresses Nationale Ouverte (BANO) qui utilise les données OSM.

En plus des adresses de livraisons, la carte pourrait aussi supporter la géolocalisation précise des entrées et des sorties logistiques, le protocole d’accès et de sécurité, les contacts à l’entrée, les horaires et jours d’ouverture pour les livraisons (et non pas seulement les ouvertures administratives) ou encore les zones d’attente de stationnement.

Un ensemble d’information rarement renseignée ou n’ayant pas d’attribut existant à date (horaires de livraison par exemple).



Cette liste de données et cas d’usages met en valeur différents constats:

  • Dans l’ensemble, les données ont déjà un support technique dans OSM, et le travail de référencement est déjà quasi-complet sur certaines thématiques et régions.
  • Si les données proviennent de l’open data, la problématique n’est pas l’automatisation technique, mais plutôt les compatibilités de licences, la nécessité de validation manuelle de ce type d’opérations et la mise à jour (qui ne sera de fait pas automatique, par manque de confiance dans les actions massives)
  • Si les données sont manquantes, des organisations, acteurs et outils sont déjà en place pour faciliter la contribution individuelle ou gouvernementale.
  • Cette démarche communautaire garantie l’amélioration constante de la base et sa pérennité dans le temps.
  • Une pérennité traduisible en un investissement rentable à long terme pour les consommateurs de données.

Le sujet de la contribution

Capture d’écran de l’éditeur JOSM, utilisé par les contributeurs OpenStreetMap expérimentés.


Comme les autres projets mobilisant la multitude, la contribution individuelle est ce qui rythme de nombreux aspects d’OSM. Elle garantit l’exhaustivité et l’actualisation du contenu. Elle assure aussi la pérennité du projet, d’un point de vue opérationnel comme juridique, avec une distribution des droits d’auteurs sur l’ensemble des contributeurs. Le caractère bénévole de ces contributions assure aussi un fonctionnement à faible cout, et une consommation sans frais.

Néanmoins, pour garantir ces avantages, des règles strictes de gouvernance doivent être mises en place. Des règles parfois obscures et rédhibitoires pour des acteurs néophytes, en particulier s’ils représentent une structure (entreprise, collectivité territoriale etc..).

Ces acteurs font alors face à une communauté hermétique, où l’accès à l’information existe, mais est complexe à trouver, et l’accompagnement dépend de quelques bénévoles bienveillants. Un constat qui ne choquera pas les habitués du logiciel libre, ou le manque de ressource rend souvent la collaboration complexe entre individus bénévoles et structures.

Un manque de ressource qui concerne d’ailleurs les deux partis. Avec un manque stratégique du côté des entreprises utilisatrices d’OSM, qui investissent peu dans la montée en compétences de leurs équipes sur le sujet. Et un manque de support financier pour les experts OSM qui pourraient porter les missions, parfois fastidieuses, d’accompagnement de ces structures à la contribution.

Une bonne illustration des différences de culture de contribution intervient lorsqu’une structure souhaite reverser ses données dans OpenStreetMap. Par exemple, une collectivité qui souhaite partager son référentiel d’aménagements installés récemment par son service voirie, ou encore un acteur MaS ayant reçu des retours d’une fermeture d’axe par ses utilisateurs.

Le processus classique de partage pour ces structures est le traitement en masse des données, ajoutée en un bloc par des scripts d’automatisation. C’est un processus couramment utilisé sur le Point D’accès National, la mise à jour écrase et remplace les données existantes.

Du fait de la contribution multi-acteur et de la qualité des données existantes, ce processus est impossible sur OpenStreetMap, il est même interdit dans la charte de contribution. Chaque ajout doit être vérifié manuellement par une personne, un processus chronophage et laborieux, même si assisté par des outils comme Osmose ou d’autres nouvelles initiatives en 2024 (Geovelo, Ministères, Enedis etc..). Sans ressources, les propositions d’amélioration de ces acteurs restent alors en attente de traitement.

Cette différence de culture résulte ensuite en deux décisions pour la plupart des acteurs. Soit l’abandon de la contribution, et l’espoir que la communauté OSM corrige les imprécisions. Soit l’internalisation de la source de données pour les acteurs qui peuvent se le permettre comme Here ou Microsoft (en partie sous l’égide OvertureMaps)

De la même manière, là où cette étude qui sonde les acteurs de la MaS sur leurs usages d’OSM permet théoriquement l’élaboration d’une liste des données prioritaires pour la mobilité et d’un plan de contribution commun. Elle se heurte à la nécessité d’une main d’œuvre humaine importante pour la validation des données qui seraient produites.

Une telle concrétisation d’un travail de référencement doit donc aller de pair avec une mobilisation, ou financement, d’un écosystème de contributeurs vérificateurs. Par exemple auprès de la fédération des pro d’OSM, et/ou sous des formes communautaires comme les mapping parties ou les défis sur https://maproulette.org/.

Pistes de travail en commun et prochaines étapes

À l’instar de l’idée d’élaboration d’une liste des données prioritaires pour la mobilité, présentée ci-avant, quelques pistes de travail ressortent des échanges avec les acteurs de la mobilité. Par exemple autour de la création de carte à missions pour contrôler le respect des lois d’urbanismes, de méthodologies de contributions citoyennes autour des plans de mobilité ou encore d’expérimentations sur des territoires pilotes.

Pour autant, ces initiatives correspondent à ce que la Fabrique des Mobilités appelle des “communs de projets”, dont l’utilité s’étend rarement au-delà de la niche des contributeurs initiaux. Une caractéristique fréquente dans les projets de la communauté OpenStreetMap, ce qui explique probablement en partie la méconnaissance du projet par le grand public.

Une piste de travail émerge alors de la part des experts consultés, il faut convaincre les décideurs du sérieux et de la pertinence d’OpenStreetMap pour les problématiques de mobilité. Ces décideurs sont directeurs dans les grands groupes, élus dans les collectivités ou travaillent dans les cabinets ministériels. Ils n’ont jamais entendu parler d’OSM, même si les structures qu’ils administrent l’utilisent parfois au quotidien. Ils ne sont pas non plus sensibilisés aux bénéfices des communs. Mais ce sont eux qui ont le pouvoir d’attribuer les ressources, financières, mais surtout humaines, nécessaires au succès des projets.

Pour ce faire, et sans tomber dans le lobbyisme, chacun à son rôle à jouer.

Nous appelons les collectivités territoriales et entreprises utilisatrices d’OpenStreetMap à partager leurs retours d’expérience et cas d’usages sous la forme d’articles ou de post sur les réseaux sociaux. Même sans être contributeur d’OSM, et simple utilisateur d’un fond de carte, ce partage à de la valeur. Il doit aller plus loin que la simple attribution juridique obligatoire. Utiliser des ressources ouvertes comme les logiciels libres et les bases partagées est une fierté qu’il faut afficher. Cela représente une démarche transparente au sein des structures et attire beaucoup de talents.

Nous appelons aussi les contributeurs OpenStreetMap à être plus didactiques sur les modalités de contributions par ces acteurs professionnels, pour simplifier les intégrations et éviter le tâtonnement qui peut créer des frustrations des deux côtés. De plus, nous encourageons les contributeurs à continuer leur travail de cartographie de la mobilité, en particulier sur les relations et les tags affectant la mobilité pour tous (PMR, mobilité alternatives). Les informations ajoutées dépassent la simple finalité d’amélioration d’OSM, car elles sont activement utilisées par les acteurs du secteur. De plus, les bénéfices sont multiples: professionnalisation de la source OSM, conception de services de mobilité pour ceux qui en ont vraiment besoin, solution pour les impératifs étatiques de servir toute la population et enfin proposition d’une alternative aux géants américains. Rares sont ces actions ludiques, inclusives, pro mobilité douce et alternatives à la fois.

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Tags : Fabmob2024

Référent (individu) : Alex Bourreau

Communauté d’intérêt : Communauté Cartographie Contributive



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